t'es là face à ton carton énorme alors que tu sais très bien qu'il y a pas grand chose dedans, deux-trois trucs pour t'faire planer, surtout pour faire planer les autres. ça t'fait peur d'avoir tout ça chez toi, dans ton appart de petit con de bourgeois, ça t'fait peur parce que tu te dis qu'un jour tu vas craquer et tu vas tout t'enfiler dans les veines, dans la tête. t'ouvres le carton scotché par un malade sûrement, il devait avoir peur que ça s'échappe, mais c'est pas vivant pourtant. tu souris parce que ça t'fait rire de penser ça. là, ça s'ouvre et ô miracle, y a ce que tu t'attendais à voir, y a ta commande, celle qui t'a coûté plus chère que tu le pensais. tu t'dis que ça a intérêt à être de la bonne, mais pour ça, t'as qu'un moyen de le savoir, pas vrai ? ça te fait grimacer de voir toutes ces conneries dans le carton, t'es pas trop en confiance avec la marchandise, t'es jamais en confiance avec qui et quoi que ce soit de toute façon. tu sais même pas si t'as confiance en toi-même. tu fouilles un peu dans le carton, tu trouves de la coke, normal, de la marie-jeanne, basique. t'as même des petits bonus du genre amphétamines, ecstasy et lsd. tu t'es fait plaisir sur le coup, silas, ça se voit que t'es pas en manque de thune. ça te fait carrément flipper tout ça, mais tu vas pas être seul, et tu vas pas tout tester, qu'ils aillent se faire foutre ces toxicos, t'es pas le cobaye. mais y a cette fille qui va arriver bientôt, tu l'as rencontré une fois presque au hasard, tu l'avais repéré parce qu'elle était jolie, mais t'as vite accroché avec elle, et tu lui as parlé de ce que tu faisais, alors elle s'est proposée. c'est original, ça t'as fait rire, alors t'as dit oui. oui pour qu'elle se ramène chez toi, la parfaite inconnue. oui pour qu'elle se défonce gentiment avec toi, dans ton appart de bourgeois.

t'es nerveuse, tu t'en ronges la peau des doigts. tu ne sais pas à quoi t'attendre, t'ignores pourquoi t'as accepté d'être ce foutu cobail à ce mec de riche. silas, tu l'as rencontré par hasard dans la rue alors que tu trouvais qu'il avait la tronche parfaite d'un mec à te refiler de la dope. tu l'as abordé, comme ça. tu lui as demander de quoi te défoncer, de quoi te rendre humaine. il t'as répondu qu'il n'avait rien sur lui ce jour-là. donc il a remis ça à plus tard, à son appart de riche. c'est comme ça que t'es devenu la testeuse de merde, la testeuse de drogue dangereuses. t'adore le danger ellie, c'est pourquoi t'as accepté sans y réfléchir. à amsterdam, c'est une autre vie qui commence, une autre vie différente de ton ancienne. et elle commence devant cette porte blanche, cachant un individu prêt à te donner tout ce que tu souhaites. t'as déjà fumé quelques joints, mais t'as jamais touché à la drogue dûre. c'est maintenant que ça commence, enfin après avoir fini de taper à plusieurs reprises sur la porte qui ne s'ouvre pas. t'attends, te mordillant les lèvres de nervosité mais aussi d'impatience. t'as peur ellie, pourquoi tu rebrousses pas chemin ? parce que t'es bornée, parce que tu cherches la merde. à amsterdam, la drogue coule à flot et t'apprends à te laisser emporter par ses vagues.

ça tape à la porte, elle est pas trop patiente ellie, parce qu'en trente secondes, elle a dû taper bien six fois. t'es pas trop speed pour le moment, tu réagis deux heures après, pourtant t'as rien pris. alors tu te lèves, t'as le cœur qui bat trop fort, t'as le cœur qui bat trop vite, tu sais pas pourquoi, parce qu'en soit, c'est pas grand chose cette fille, elle vient juste t'aider à pas être tout seul face à tout ça. et t'ouvres la porte, tu tombes nez-à-nez avec la brune de tes souvenirs fumeux, pas de sourires, rien, t'es de marbre, peut-être un peu stressé et impatient de t'fumer un joint. vas-y entre. t'es pas trop poli avec elle, mais t'es comme ça, c'est pas méchant en soit. t'as qu'à faire comme chez toi. t'aimes pas ouvrir ta porte à des inconnus, surtout aux jeunes d'amsterdam, parce que t'as un appart trop grand comparé à beaucoup. tu veux boire un truc ? manger ? tu vas pas la lâcher comme ça dans la gueule du loup. du coup, tu sais pas trop quoi dire face à ellie, alors ouais, tu lui proposes des trucs basiques avant de lui proposer de faire le cobaye.

tu sens ton coeur battre une fois sur deux, la gorge te serrer quand il ouvre la porte et t'invites à entrer. c'est la première fois que tu vois une maison aussi grande, aussi bien meublée. c'est la première fois que tu tombes amoureuse. ouais voilà, tu tombes amoureuse devant l'espace dans cet endroit. t'as jamais vu un endroit parreil, ça te plait et ça te fais peur. toi ellie t'es habitué aux appartements miteux, à marcher sur les pieds de ta mère tellement c'est petit. là c'est tes rêves de princesse dans un chateau qui prenne un coup, c'est ton côté superficielle qui ressors. mais t'es trop concentré à garder un rythme normal dans ta respiration pour pleurer devant une telle richesse. t'es trop concentré à le regarder, cet inconnu mysterieux qui vas te vendre du rêve avec ses drogues. t'avances doucement dans la pièce, le détaillant du regard. il t'invite à faire comme chez toi, donc tu te laisses tomber sur le canapé comme une épave. t'es nerveuse ellie, trop nerveuse que t'en perds les mots. « ouais non ça va... en fait j'prendrais un verre d'eau, steplais. » finis-tu par pondre malgré ta timidité. il est beau silas, il te fais drôlement penser à ton frère. drôlement parce qu'en fait, il est tellement different de lui. « t'es pas tout seul à vivre ici, si ? » demandes-tu pour casser le silence qu'il a entre vous deux. t'es curieuse pour une fille qui est ici que pour se défoncer.

elle a l'air perdue, t'as envie de te cacher sous les jupons de ta mère pour une fois, t'es mort de honte de lui montrer ton appart à ellie. t'as honte parce qu'elle pouvait pas vraiment s'attendre à c'que t'aies un grand logement avec ta dégaine de gosse du cirque, avec ta dégaine de dealer. tu dis rien quand elle perd ses mots et qu'elle regarde comme une gamine pleine de rêves ton appartement et tu reviens avec le verre d'eau que tu poses sur la table basse devant elle. elle est curieuse la fille, ça t'fait sourire, t'aimes bien les personnes curieuses, parce que tu l'es, toi aussi. non y a une fille qui vit ici, j'sais pas où elle est ni quand elle va rentrer par contre. elle est pas au courant la belle aurora que tu deales, tu serais bien dans la merde si elle le répétait aux bobos, pas vrai ? tu t'assois dans le fauteuil sur la gauche du canapé où ellie est affalée et tu donnes un coup de pied dans le carton au sol. bam. il est là le moyen d'échapper à la misère, ellie. il est là. t'es sûre de vouloir faire ça avec moi ? tu la regardes de tes yeux couleur saphir, t'as le regard tranchant, froid et doux à la fois, un peu comme ton âme. tu veux pas la forcer, mais tu veux pas non plus qu'elle retourne sa veste, alors tu dis ça sur un ton sec comme pour dire maintenant que t'es là, tu l'fais.

il revient avec le verre d'eau que t'as commandé. tu lui souris faiblement pour le remercier, avant d'en prendre une petite gorgée et déposer le verre à nouveau sur la table. t'as même pas soif en fait, le goût fade du liquide qui descend dans ta gorge te donne mal au cœur. la nervosité te donne mal au cœur, un mélange de curiosité et de peur se bat en toi dans une bataille sans fin. ça te plait pas ellie, mais tu dis pas un mot. tu gardes ça en dedans parce que tu veux pas paraître ridicule. tu veux pas qu'il pense que tu vas te défiler. et comme s'il lisait dans tes pensées, il te remet en doute. ressaisis-toi ellie, t'as déjà fait pire que prendre de la putain de drogue. mais c'est dans la couleur de ses yeux que tu trouves du courage, dans son regard posé sur toi qui te fais rougir. la curiosité gagne sur la peur et tu ne peux pas t'empêcher de jeter un coup d'oeil à la marchandise. y'a de tout. c'est le paradis des bonbons, c'est le bonheur en sachet. « c'est pas comme si t'allais me refiler de la merde, je te fais confiance ! » te contentes tu de répondre à sa question. tu sais pas d'où elle sort cette confiance, mais elle est présente et chasse les inquiétudes en toi. c'est ses yeux qui te transportent ailleurs, et le décor autour de toi. t'es prête, enfin.

t'aimes pas ce moment fatidique où tu dois tester la marchandise. en fait, c'est toi qui veux toujours la tester, parce que t'as pas envie de te retrouver avec de la merde, t'as pas envie de te faire descendre. tu regardes ellie. tu te demandes pourquoi tu lui as dit de venir. elle est trop jolie, ellie, pour se détruire avec toi, trop douce pour se salir. c'est trop tard pour lui dire de reculer, elle te fait confiance, tu sais pas trop pourquoi en plus, elle te connait pas. tu pourrais être un vrai taré qu'elle te ferait quand même confiance. tu fouilles encore dans le carton et cette fois, t'en sors la cocaïne. tu testes pas la marie-jeanne, ou alors, tu gardes ça pour plus tard. tu te retrouves à genoux devant la table basse, à faire des jolies petites lignes blanches, bien droites, fines. ouais t'inquiètes, il devrait pas y avoir de problèmes. tu la rassures comme tu peux, t'es pas très doué pour ça. t'as préparé deux rails, pas trop grands, c'est juste pour tester. le seul truc que t'as pour sniffer, c'est un billet de cinq euros dans la poche de ton jean. alors tu le sors et tu te lances. t'as un sourire qui te monte jusqu'aux oreilles et tu regardes ellie. à toi. t'as encore tes saphirs qui se posent sur elle, plus délicatement cette fois. t'as pas envie qu'elle prenne peur.

qu'est ce que t'as fais de la vieille ellie qui ne faisais confiance à personne ? qui ne sortait pas le soir, qui veillait sur sa petite mère et qui bossais durement pour gagner de la petite argent ? qu'est ce que t'as foutu ellie, en venant ici ? dans la ville où tout est permis, où c'est légal de se défoncer la tête en pleine rue ? tu l'as mise dans une cellule, cette ellie. voilà ce que t'as fais. tu l'as abandonné comme tous les gens que t'aiment ont déjà fait. tu l'as abandonné en ne faisant aucun double de clé pour la faire sortir. tu ne veux plus connaitre cette ellie, tu veux oublier le bordel de ton passé. c'est comme ça que t'as trouvé comment te sentir mieux, en te défonçant. en tentant autre chose que de simple joint qui te donne faim et qui te fais grossir. voilà la première fois qu'une ligne blanche t'est destinée. les autres fois, tu refusais. tu ne voulais pas sniffer de la drogue parce que tu trouvais ça répugnant. ça te faisais peur de sniffer avec un billet, tu voulais pas attraper le sida ou un truc du genre. mais là tu t'en fiches, tu t'en fiches parce que ses yeux te donnent le feu vert. ils te rassurent et te promets que ça iras. tu te retrouves à genoux près de la table basse, près de silas. t'as conscience n'a plus le temps d'intervenir, il est trop tard. t'as déjà le billet dans la narine et t'enfiles la track doucement. doucement mais durement, ça fais mal. c'est pas agréable, mais t'encaisses comme une grande. « t'as envie de rire ? » lui demandes-tu en posant ton regard dans ses yeux. ne te perds pas dans ses yeux ellie, restes avec nous. « c'était la première fois que je faisais ça... » finis-tu par avouer après avoir mis ta fierté de côté. la poudre pique dans ton nez, tu sniffes plus fort dans le vide cette fois pour l'aider à passer.

quand tu regardes cette fille, tu te dis que t'aurais même pas eu le courage de faire la moitié de ce qu'elle a osé faire aujourd'hui. à savoir, accepter l'invitation d'un inconnu chez lui pour goûter de la marchandise. faut pas être totalement net dans sa tête pour faire ça. mais tu la respectes, juste pour le fait de t'avoir fait confiance. t'as pas sniffé beaucoup, mais tu sais que les symptômes vont apparaître bientôt, alors t'essayes de rester vigilant. c'est pas la première fois que tu fais ça, t'aimes bien le faire d'ailleurs, une fois que t'es entrée dans ton trip, tu te sens puissant, comme si rien ne pouvait t'arrêter. tu regardes ellie, t'es impassible et tu fronces les sourcils en secouant négativement la tête. non, pas encore. les effets devraient apparaître dans trois ou quatre minutes. tu regardes dans le carton. tu peux pas tout tester, encore moins ellie, surtout qu'elle t'avoue que c'est la première fois qu'elle fait ça. tu prends ton air le plus doux, le plus posé et tu la regardes, encore. elle te plairait presque, la ellie. ok, t'as le choix maintenant. ecsta, amphet ou lsd. on va pas tout faire, j'ai pas envie que tu prennes peur ou quoi tu vois ? tu lui souris, tu veux surtout pas qu'elle s'affole. tu sniffes dans le vide, ton nez te pique. tu sens que dans pas longtemps, tu vas pas tenir une seconde en place.

ça commence à descendre dans ta gorge, tu le sens parce que ça gèle mais tu le goûtes aussi. un goût désagréable, un goût de chimique intense qui te donne envie de gerber. mais avec de l'eau, ça passe. tu descends le reste de ton verre en une claque, pas le temps de reprendre ta respiration. t'as plus ou moins hâte de ressentir les effets, maintenant que tu connais le goût de cette merde. mais tu t'en fiches, c'est trop tard. ton regard suit le visage de silas qui regarde dans la boite. tu ne sais pas avec quoi continuer, tu ne sais pas si c'est bon ou mauvais de mélanger. tu t'y connais pas en drogue ellie, et pourtant tu t'embarques dans des plans plus ou moins sécuritaires. tu perds la boule, c'est certain. « j'crois que l'ecsta vaut la peine d'être essayé toute seule, genre un trip que de ça... avec la coke ça risque de tout gâcher non ? m'enfin je sais pas c'est toi l'expert ici, à toi de décider ! » et encore une fois, tu lui accordes une confiance qui te surprends à chaque fois. tout est dans son sourire et sa façon de te regarder, sa façon de te pousser à continuer. t'as pas peur ellie, t'es pas une poule mouillée. et puis c'est bon de sentir ton cœur battre de plus en plus vite, tu pourrais même te lever et faire le tour de la maison en cinq minutes si tu le voulais. tu te sens bien, ça commence.

ça te fait chier, parce que tu te dis que tous les mélanges valent pas le coup ce soir. alors tu renifles un peu, tu fais la moue tout seul sans que ellie puisse comprendre. tu commences à ressentir les effets, c'est ton inconscient qui te le fait savoir. tu te rassois sur le fauteuil et t'as tes jambes qui se mettent à bouger toutes seules. t'as une furieuse envie de courir mais tu te retiens. ouais, mais le truc, c'est que tous les mélanges sont pas supers là. et là, tu te dis que lsd et joint, ça peut le faire. ça prendra le dessus sur la coke, t'en es certain. alors tu sors rapidement deux cachets, t'as des gestes rapides, imprécis quand tu les poses sur la table. tu prépares un joint avant, parce que plus tôt c'est fait, mieux c'est. tu fais ça vite, tu fais ça bien, t'as l'habitude. t'as déjà pris du lsd ? t'aimes bien ces cachetons, t'aimes bien de temps en temps. t'as bien compris qu'elle te faisait confiance, ellie, alors tu joues sur ça. tu la regardes, comme si tu pouvais transpercer son âme de tes yeux, comme pour lui dire que de toute façon, elle craint rien avec toi.

un sourire commence à s'étirer sur tes lèvres. un sourire dont t'ignores l'origine, la raison. tu souris, c'est tout. ellie qui souris, c'est rare mais ça fais du bien. tu te dis que c'est surement l'effet de la dope, l'effet de te sentir transporter. tu ne penses à rien, tu profites du moment en oubliant le reste. c'est bien de se laisser aller parfois, de tout simplement arrêter de réfléchir. silas s'active devant tes yeux, tu le regardes faire. impossible pour toi de le quitter du regard, t'as l'impression d'être dans un autre monde. t'as mère n'a jamais aborder le sujet de la drogue, presque. t'as jamais vu ce qu'elle consommait, et tu t'en fichais en fait. parce que t'as jamais vraiment voulu entrer dans ce cercle vicieux. jusqu'à maintenant. tu lui réponds en un hochement de tête, les yeux relevés sur son visage. « peut-être une fois, mais j'en avais pas assez pris pour ressentir les effets ! » ajoutes-tu avant de changer de position, posant tes bras au bords de la table. « ça fait combien de temps que tu fais ça ? » te permets-tu de lui demander, sans aucune gêne. tu ne sais pas pourquoi t'as dis ça, mais tu veux savoir. ça t'intéresse.